Provenance : Ancienne collection de la famille Diéterle, Paris.

Bibliographie :Pierre Kjellberg, Les bronzes du XIXe siècle, Tours, 1996, p . 58 exemplaire reproduit p. 62 ; Michel Poletti et Alain Richarme, Barye – catalogue raisonné des sculptures, Edition Gallimard, Vérone, 2000, p. 92, modèle référencé F22, exemplaire reproduit p. 93 n° 41 ; William Johnston et Simon Kelly, Untamed : The art of Antoine-Louis Barye, 2006, Prestel, Singapore, 2006, modèle cité p. 130.

Références bibliographiques :Gustave Planche, Portraits d’artistes. Peintres et sculpteurs, « M. Barye », Paris, 1853, t.2, p. 167 à 169 ; Roger Ballu, L’œuvre de Barye, Paris, 1890, p. 79 et 80 ; Charles Saunier, Barye, Paris, 1925, modèle cité p. 29 et 30 ; G.F. Benge, Antoine-Louis Barye. Sculptor of romantic realism, Pennsylvania, 1984, p. 96 et 97.

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Description

Le génie d’Antoine-Louis Barye (1795-1875) a laissé une empreinte indélébile dans l’histoire de la sculpture française. Fils d’orfèvre, formé par les meilleurs orfèvres parisiens (Biennais, Fauconnier), initié au modelage par le sculpteur Bosio et au dessin par le peintre Gros, il suit aussi les cours à l’Ecole des Beaux-arts de Paris. De sa formation initiale il garde le goût pour les détails et la précision. A cette époque, déjà, il fréquente assidûment la Ménagerie du Museum du Jardin des Plantes pour y dessiner l’animal « ad-vivum ». Avec une rigueur scientifique incontestable, il étudie de manière concrète les fourrures, les mouvements, les musculatures et va jusqu’à assister aux dissections des bêtes mortes. C’est avec son Tigre dévorant un gavial exposé au Salon de 1831 qu’il se fait remarquer. Le Salon de 1833 marque sa consécration avec le célèbre Lion au serpent, pièce monumentale que le roi lui commande en bronze. Il jouit désormais de la protection de la famille royale, illustrée notamment par la commande d’un important surtout de table par Ferdinand Philippe d’Orléans (1834-1839), dont certaines pièces sont présentées au Salon de 1837 qui pourtant les refuse. A la suite de ce refus Barye ne présente plus aucune pièce au Salon jusqu’en 1850. Pendant cette période toutefois les commandes affluent de la part de collectionneurs prestigieux pour lesquels Antoine-Louis Barye conçoit ses plus beaux modèles de bronzes d’ornement qui révèlent un véritable talent de décorateur, puissant et inventif. Parallèlement, toujours extrêment soucieux de la qualité de ses bronzes, il ouvre à la même époque sa propre fonderie s’occupant à la fois de la fabrication et de la commercialisation de ses œuvres jusqu’à son association avec l’industriel Emile Martin en 1845. Celle-ci dure jusqu’en 1857, date à laquelle Barye reprend, et ce jusqu’à sa mort, le contrôle de sa production avec son atelier qui comprend sculpteurs, ciseleurs et patineurs. A nouveau officiellement reconnu il reçoit à l’exposition universelle de 1855 la Grande Médaille d’Honneur, à celle de 1867 la Grande Médaille d’Or et est élu à l’Institut en 1868 à l’unanimité des suffrages. L’année 1874 est celle de la publication du dernier catalogue des bronzes de Barye au 4, quai des Célestins.

Angélique et Roger montés sur l’hippogriffe ( 1ère version, bouche ouverte)

Ce chef d’œuvre d’AntoineLouis Barye, à la provenance prestigieuse et dont il n’existe que troisexemplaires, est véritablement une pièce exceptionnelle.

Elle constituait la pièce maîtresse d’une garniture de cheminée et était assortie à l’origine de candélabres. D’après les biographes de Barye le modèle aurait été commandé vers 1840 par le duc de Montpensier afin de rivaliser avec le magnifique surtout de table que Barye avait réalisé pour son frère le duc d’Orléans (en partie conservé à Baltimore, Walters Art Museum).

En dehors des dimensions, toute liberté de conception aurait été laissée à Barye qui a choisi d’illustrer un vers d’un récit de chevalerie très en vogue à l’époque, tiré du Roland Furieux de l’Arioste (chant X), écrit au début du XVIe siècle et traduit en français depuis peu.

L’histoire se passe à l’époque de Charlemagne et raconte les aventures d’une belle princesse indienne amenée en France par le chevalier Roland et qui finit par échapper à ses prétendants avant d’être malheureusement capturée pour être offerte en pâture à l’orque, un monstre marin. C’est alors que le chevalier Roger monté sur son animal fantastique, l’hippogriffe, la délivre du rocher où elle est enchaînée avant qu’elle ne s’échappe à nouveau pour finalement rencontrer l’amour en la personne de Médor, un prince sarrasin blessé.

Ce thème éminemment romantique (l’exaltation de l’amour héroïque, l’animal fantastique, l’épopée chevaleresque, le contexte historique…), a été traité à maintes reprises durant la première moitié du XIXe siècle (Delacroix, Doré, Ingres…). Mais à la différence de ces derniers qui représentent Roger plongeant sa lance dans la gueule du monstre pour délivrer Angélique attachée à un rocher, Barye choisit d’illustrer le moment où Angélique est hors de danger montée sur l’hippogriffe prenant son envol au-dessus des flots et fermement tenue par Roger. Pareil élan romantique reste unique dans l’œuvre de Barye.

Le modèle a été édité dans deux versions sans doute contemporaines. Les différences entre les deux résident

principalement dans la position de la crinière et de la queue de l’hippogriffe et surtout dans sa bouche qui est ouverte dans la première version et fermée dans la seconde. Si le modèle dans les deux versions est rare en fonte d’époque, il l’est tout particulièrement pour la 1ère version (bouche ouverte), la nôtre, puisqu’il n’en existe que trois exemplaires, tous numérotés et estampillés « Barye ». Le n°1, identifié à la Galerie Cohen à New York, présente une base légèrement différente puisqu’elle intègre un cylindre de pendule. Le

n°2 a appartenu à une collection britannique, Sladmore Gallery, tandis que le n°3, le nôtre, provient directement de la collection de la famille Diéterle, une dynastie d’artistes, de collectionneurs d’art et de marchands, avec laquelle Barye a très vite entretenu des relations amicales.

C’est en effet au Jardin des plantes que se forme le lien entre Barye et la famille Diéterle, puisque c’est là que Barye rencontre Charles Diéterle, élève de Corot à qui Barye donne des conseils pour peindre des animaux. Peu à peu la famille constitue une collection d’œuvres de Barye, dont faisait partie notre sculpture jusqu’à aujourd’hui. Quant à l’exemplaire numéroté 4, actuellement conservé au Metropolitan Museum of art de New York(10.133.1), il relève déjà de la deuxième version puisqu’il présente une bouche fermée. Il permet ce faisant d’attester qu’il n’y a pas eu plus de trois exemplaires de la première version, ce qui fait de notre sculpture une pièce tout à fait exceptionnelle.

En plus de sa rareté, cette pièce est aussi remarquable par l’originalité de sa composition et la perfection de sa facture. Dès sa création, le catalogue Barye de 1844 la présente comme « une splendide et vraiment artistique garniture de cheminée » et le modèle est décrit par certains contemporains comme « une des inventions les plus ingénieuses de l’art moderne » (voir Gustave Planche, op. cit. supra, p. 167). L’invention formelle fait preuve d’une grande érudition traduite par le regard d’un passionné de la nature.

La composition induit une sensation dynamique d’envol et de course effrénée grâce à l’hippogriffe présenté pattes tendues à l’avant comme à l’arrière, ailes à demi déployées, tête tendue en avant. Elle est encore plus impressionnante dans la première version avec sa bouche ouverte, sa crinière dressée et sa queue en panache. A ce sens du mouvement est associé la force avec laquelle Roger retient Angélique, dont la position instable accentue l’ardeur de l’instant. La puissance qui se dégage de l’ensemble est adoucie par la ligne gracieuse et souple du corps d’Angélique à laquelle fait écho l’ondulation de la queue de la créature marine située sous l’hippogriffe et qui sert de base au groupe. Il en résulte une pièce à la fois dynamique, aérienne puissante et élégante.

A l’allure de cette composition s’ajoute une facture minutieuse, qui grâce à une ciselure particulièrement fine, reflet de la formation initiale de Barye, rend la pièce vivante. Ainsi Barye joue sur l’opposition des matières : la robe du cheval minutieusement travaillée permet un jeu d’ombre, encore accentué par l’application de la patine, qui contraste avec l’aspect lisse de la peau d’Angélique sur laquelle, au contraire, la lumière glisse.

Il soigne particulièrement les détails comme l’armure de Roger (décor du casque surmonté d’une chimère, cuirasse rivetée, éperons…) ou la description de l’hippogriffe. Cet animal fantastique est conçu de manière totalement réaliste à partir de divers animaux très finement et justement observés. Il présente un corps de cheval dont les pattes avant se terminent par des griffes de rapace, un bec d’aigle, des ailes de perroquet fidèlement rendues et attachées au corps de l’animal avec la plus grande vraisemblance. Sur la terrasse animée d’un poulpe parmi quelques vaguelettes se dresse le monstre marin à queue de serpent et tête de dauphin qui semble inspiré des recueils d’antiquités du Comte de Caylus (voir Benge, op. cit. supra, fig. n° 235) ou de certains éléments décoratifs de la renaissance italienne.

L’imaginaire est si admirablement combiné à une rigueur scientifique qu’il en devient réel…

Tout dans cette sculpture conclut à son excellence. Barye en avait d’ailleurs pleinement conscience puisque dès le départ il en demande un prix largement supérieur aux autres pièces de son catalogue.

Informations complémentaires

Dimensions 51 × 67 × 30 cm
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